Le gouvernement veut réduire les aides CEE à la rénovation pour financer MaPrimeRénov’ et le bonus auto

Peut 20, 2025 - 19:00
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Le gouvernement veut réduire les aides CEE à la rénovation pour financer MaPrimeRénov’ et le bonus auto

Le gouvernement repense les CEE

Le projet d’arrêté vise à sortir du périmètre des CEE plusieurs types de travaux qui, jusqu’alors, ouvraient droit à ces certificats. Parmi les exclus, la récupération de chaleur sur les groupes frigorifiques, le calorifugeage de réseaux ou encore l’isolation de tuyauteries de chauffage. Des opérations courantes dans l’industrie et les collectivités. Bercy explique vouloir corriger des « situations de surfinancement », pointant un retour sur investissement inférieur à trois ans pour ces travaux, désormais rentables sans soutien public.

L’administration argue, dans des propos rapportés par Les Echos, que les CEE « doivent économiser de l’énergie et avoir un effet déclencheur avéré. Avec l’évolution des coûts, certaines peuvent devenir très rentables et perdre leur effet incitatif ». Mais pour de nombreux observateurs, cette purge technique cache une manœuvre bien plus politique : intégrer dans le mécanisme des CEE des dépenses telles que MaPrimeRénov’, le bonus automobile ou le leasing social. Ces aides, actuellement financées par le budget de l’État, pourraient ainsi être basculées dans un dispositif reposant sur les obligations des fournisseurs d’énergie. Ce ne serait plus l’État qui paierait, mais indirectement les consommateurs via les prix de l’énergie.

Une filière prise au dépourvu

« Personne au sein de la filière n'a été consulté, ni reçu de signaux faibles : nous avons découvert le projet d'arrêté il y a quelques jours ! », s’indigne, dans Les Échos Jacques Assant, PDG du délégataire CEE Adeeno. Le texte, s’il était adopté tel quel, entrerait en vigueur dès le lendemain de son passage devant le CSE. Une brutalité qui scandalise les acteurs du secteur. Le Groupement professionnel des CEE (GPCEE), par la voix de son vice-président industrie Pierre-Damien Grosjean, dénonce une réforme à marche forcée. Depuis le début de l’année 2022, ces opérations concentrent à elles seules un cinquième des financements alloués via les CEE, un volume particulièrement conséquent.

Selon les professionnels, la suppression des fiches toucherait entre 1,5 et 2 milliards d’euros de financement annuel, sur un marché évalué entre 4 et 6 milliards d’euros. Pire encore, le GPCEE alerte sur les effets collatéraux d’un tel séisme réglementaire. Selon lui, le marché de la rénovation énergétique pour les professionnels (copropriétés, bâtiments publics, secteurs industriels) risque d’être le principal lésé, alors même qu’il se distinguait par sa rigueur face aux multiples dérives constatées chez les particuliers.

Une stratégie à haut risque pour des économies à court terme

En façade, le gouvernement applique les recommandations de la Cour des comptes, qui n’a cessé de pointer les dérives du dispositif CEE, entre fraudes et effets d’aubaine. Mais en coulisses, le vrai motif est budgétaire. Difficile de ne pas voir dans cette réforme une tentative de délestage des finances publiques. D’après les chiffres avancés, ce sont potentiellement 2 milliards d’euros pour MaPrimeRénov’, 500 millions à 1 milliard pour le bonus automobile, et 300 millions pour le leasing social qui pourraient être « transférés » vers les CEE. Or, le marché des CEE n’est pas une vache à lait inépuisable.

Plus les obligations imposées aux fournisseurs augmentent, plus ceux-ci répercutent les coûts sur les prix de l’énergie. Une mécanique bien connue et risquée… qui n’échappe à personne. D’autant que les règles sont déjà en pleine révision pour la 6e période des CEE, qui s’ouvrira le 1er janvier 2026. Pour Pierre-Damien Grosjean, « sur le fond, des changements peuvent se discuter », mais pas dans ces conditions. Le GPCEE prévoit donc de déposer un amendement pour ajourner l’entrée en vigueur du texte. Reste à savoir si le gouvernement entendra ces objections… ou poursuivra sa marche solitaire.

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